La traque est lancée - Solveig x Odenskat

Il n'y a rien de pire qu'un plan qui ne fonctionne pas à deux mètres de la fin. Odenskat aurait dû tout avoir : autant le matériel que le vivant. La halle, le rôle de jarl et sa femme. Comme d'autres, il aurait pu choisir de s'accoquiner avec des humaines envoûtées et espérer avoir des jötnar dans les portées. Mais ses croyances le forcent à croire que ces engeances auraient malgré tout les faiblesses connues des humains. Oden veut des héritiers forts, robustes, indestructibles face aux vicissitudes de la vie. Courtiser n'est pas dans ses habitudes et ça ne l'intéresse pas.

Tout ce qui lui faut, c'est une jötunn et quelques siècles devant lui pour espérer procréer d'immortel à immortel. Mais la prophétie de la völva résonne dans sa tête : il n'a plus le temps. Va-t-il périr ? Perdrait-il en vigueur ? Le fait est que la question du temps devient maladive. Une partie du patrimoine acquis sert à engager des personnes pour retrouver la femme de son prédécesseur. Une autre à missionner des sbires de lui présenter des partis acceptables. En tant que jarl, il a de quoi plaire. Il ne fait pas son difficile, mais, en même temps, ne souhaite pas prendre le risque d'accepter une femme qui partira du jour au lendemain, encore pire une fois qu'elle sera engrossée. Ainsi a-t-il l'œil nostalgique quand il pense à l'asservissement des immortels : il doit bien subsister quelques jötnar enchaînées ?

Pour l'heure, Odenskat n'est pas aux solutions désespérées et ces questions d'héritage se tissent dans un parallèle où il se prépare à mener des affrontements. S'il ne peut briller par sa descendance, il doit s'assurer de rayonner par ses faits d'armes. Que les skalds récitent ses faits d'armes à la place de ses enfants.

Encore aujourd'hui, il reçoit de nouveaux chasseurs de tête prêts à accepter la mission. Même en déployant autant de moyen, Odenskat n'est pas persuadé de revoir la jötunn. Everlasting est grand, et si elle a trouvé le moyen d'aller sur un autre continent, c'est encore pire... Néanmoins, Oden ne baisse pas les bras. Il sait ce qu'il veut et trouvera un moyen de l'obtenir. Avec elle ou une autre. Installé dans son office, il lit les comptes rendus des derniers mouvements dans le quartier qu'il dirige.

Ce qu'on lui dit, ce qu'il veut entendre, tout est mêlé dans un esprit qu'il range par cases. Ainsi passer d'un sujet à l'autre n'est pas compliqué. Partitionner les problématiques ne lui demande aucun effort particulier. Ces derniers jours, Odenskat a relancé une mission qui lui tient à cœur : retrouver celle qui est censée se lier à lui. Il a gagné un pari dont un mariage faisait partie des récompenses. La retrouver lui éviterait d'avoir à jouer du social pour assurer sa descendance. Il faut avouer que c'est pratique, surtout quand le temps manque.

Le jarl n'a jamais témoigné de grandes appréhensions et encore moins sur des questions existentielles. Mais apprendre que son immortalité n'est plus assurée, ça met un coup dans les lampions... Assez pour que de nouveaux prospectus aient été placardés sur quelques panneaux d'affichage dans la citadelle. On vient lui annoncer qu'une candidate s'est manifestée. Oden congédia les gardes d'un mouvement de main et pris son temps pour se lever de son épais fauteuil de velours. Le luxe n'a jamais été monnaie commune pour lui qui trouve toute cette opulence superflue. Mais il s'y est accoutumé sans grand effort.

"- Entre et dis-moi ton nom, mercenaire."

Odenskat n'est pas des plus loquace et surtout, ne voulait pas tergiverser cinquante ans. De quelques pas, le jarl a contourné son bureau de bois massif pour s'y adosser. Les mains s'appuyant sur la tranche biseautée. D'un regard sans gêne, il se mit à jauger la personne qui se présentait à lui. De haut en bas, les yeux plissés d'une intrigue. Jötunn, Einheri, humaine ? Il ne savait l'affirmer, mais s'en moquait pas mal, il faut dire...