Des explications sont de mises

Un Jötunn sorti de l'office d'Eivert, où il travaillait honorablement à ses tâches de conseiller. Bien qu'il regrette tous les jours leur défaite lors de la précédente guerre, il a toujours tenu à fournir un travail impeccable et exemplaire. Une façon pour lui de tenir à sa santé mentale après une éternité ici. Ça et quelques voyages chez les Humains, cela le rendait nostalgique d'être considéré sans réserve comme une divinité. Son sang était certes dilué, mais tout de même ! Enfin, Eivert venait donc de recevoir une nouvelle de la part dudit Jötunn. Il attendit que la porte se referma avant de se permettre un soupir et de s'enfoncer dans son fauteuil, relâchant un peu de pression.

"Chaque problème est un grain de sable et j'hérite d'un désert chaque jour." Dit-il d'une voix exagérément lasse.

C'était encore un souci sur la gestion des Einherjar. La Fierté, c'était toujours ceux-ci qui lui posaient le plus de problèmes. Marcher sur des œufs, amener de bonnes idées, montrer qu'on travaillait avec les Jötnar et que toute animosité était superflue. Les autres Einherjar pouvaient le respecter, ou même sa fonction, mais ça s'arrêtait là. Rares étaient ceux lui mangeant dans la main ou se fiant à lui. La politique... Enfin, je vais bien devoir trouver le moyen de gérer ça. Sa main s'empara d'un ouvrage qu'il avait lui-même rédigé, compilant des informations diverses et apposées au fil des décennies, pour trouver un début d'idée sur comment aborder cette nouvelle tâche.

Alors que le bois de la cheminée venait à manquer, une autre personne entra. Celle-ci fit plisser les yeux du conseiller, car ce n'était pas un être ordinaire. C'était un allié de confiance et il avait la charge de voir et d'entendre à sa place. Ses rapports donnaient souvent matière à réfléchir à Eivert, dont les doigts refermèrent la couverture du livre qu'il tenait. L'homme parla calmement et sans détour. Un Huskarl aurait entendu parler de rumeur sur les combats clandestins. Une bien sinistre déclaration, s'il venait à perdre "son" nouveau projet, une part de lui verrait cela comme une injure. Encore un grain de sable... Il remercia son allié en lui confiant un travail.

"Va me chercher la Femme qui s'occupe de cela."

Il lui donna le lieu et se rendit à l'Huskarl en question. Ses pas écrasaient la neige alors qu'il sentait une colère monter en lui. On ne le dépouillerait pas de ses biens ! Ses ombres se projetteraient partout, dans chaque interstice et personne ne sera à l'abri. Lubie du moment ou non, ce n'était pas un idiot obéissant qui allait mettre en péril ce qui lui appartenait !

Avant d'arriver, il recomposa son visage. Il fit une brève halte dans un recoin sombre, respirant doucement. L'obscurité le calmait, comme une étreinte qu'il goûtait depuis toujours. Une fois son visage recomposé et son un semblant de calme revenu, il se décida à entrer. Une banale visite, juste savoir si des troubles agitaient Everlasting, s'ils ne manquaient de rien pour faire leur travail. Quelles étaient les dernières nouvelles, en somme !

"Des combats clandestins ? Oui, j'ai eu vent de ces rumeurs. J'ai quelqu'un qui enquête dessus, je vais devoir vous demander de ne rien ébruiter. Si elles sont fausses, vous pourriez donner des idées à la population. Si elles sont vraies, vous pourriez alerter les responsables. Je ne souhaite pas mettre en péril le travail de mon agent."

Eivert s'évertua d'expliquer calmement pourquoi il fallait conserver le silence sur cette histoire. Comment le cerveau de cet homme peut-il encore fonctionner après tous les coups qu'il a reçus à la tête dans sa vie ? Néanmoins, il réussit à trouver comme cette "rumeur" avait pu remonter. Apparemment, des combattants de l'arène en aurait parlé sans précaution et auraient étés entendus. Intéressant ça. Il essayait par ce biais de calmer sa frustration, mais c'était un pansement sur une jambe de bois. La présence de l'Huskarl et cette conversation l'importunaient désormais au plus haut point, et il savait très bien sur qui déversait cette colère. Il s'assura une dernière fois que l'homme avait bien compris avant de le quitter et de se rendre au point de rendez-vous.

Son air souriant d'usage était vissé sur son visage. Il ne voulait pas donner l'impression d'être inquiet si on le reconnaissait. Son cœur battait plus vite, pressé de décharger tout un flot de pensées acerbes. Il espérait ne pas attendre et qu'elle soit déjà sur place. Se calmer avant ne servirait à rien.

Eivert s'arrêta devant la porte. Il fixa le bois, détaillant les nervures, le fer forgé des gonds et de la poignée.

Il cherchait à respirer calmement, alors que son souffle émettait un son guttural. Ses mains frémissaient le long de son corps et ses yeux ne ressemblaient plus qu'à deux petites pointes noires. Il se décida à entrer, poussant la porte avec précaution. Il ne manquerait plus qu'il ne la casse par mégarde. Et tout ce qui le reçu, fut une parole frivole. Une enfant qu'on a prit la main dans le sac.

Eivert ne dit rien alors que ses yeux se posent sur cette sauvage. Sa main referma la porte, la faisant claquer plus fort qu'il ne l'escomptait. Le conseiller resta immobile, comme interdit de longues secondes et c'est alors que son sourire se fana. Plus de masque, plus d'arrogance feinte. Les dents qu'ils dévoilaient désormais n'affichaient que de la rage à peine maîtrisée. Il relâcha enfin sa prise sur la poignée de la porte avec une lenteur inaccoutumée alors qu'il se tournait vers celle qu'il avait fait venir. De ses yeux coulèrent des larmes d'ébène... Non, ce n'était que des ombres. Comme des tentacules jouant tout autour de ses yeux, faisant ressortir leur clarté entachée par une minuscule pupille. Ses mots ses détachèrent de sa bouche au rythme mécanique d'un métronome.

"Peux-tu... M'expliquer... Cette farce...?" Eivert fit quelques pas, prenant soin de garder une distance avec cette femme. Par soucis théâtral, il voulait se laisser un peu de temps avant de l'acculer. "Herkja ?!"

En prononçant son nom, sa propre ombre se déforma, engloutissant le mur derrière lui. Cette ombre n'était que la silhouette du visage d'Eivert, avec deux yeux malveillants qui dominaient la guerrière. Il arrivait à l'ombre de se défigurer, comme pour incarner sa frustration. De ne ressemblait à rien l'espace d'une seconde ou de voir d'autres tentacules apparaître avant de revenir se fondre dans la masse d'ombre. Eivert avait reprit un peu de calme et politicien qu'il était il parla de nouveau comme à son habitude, même s'il avait ce timbre de voix froid, à des lieux de ses paroles sucrées habituelles.

""Il m'a été rapporté que des combats clandestins avaient, peut-être, lieu en ville. Une idée sur la véracité de cette information, Femme ? Eventuellement un avis à partager sur comment cette rumeur a-t-elle pu arriver aux oreilles de la garde ? Ou de pourquoi j'ai dû intervenir personnellement sur cette affaire ?"

Eivert se garda bien de lui dire comment la garde en avait eu connaissance. Moins il donnait d'informations et plus il était susceptible d'apprendre quelque chose ici. Ses poings étaient serrés et il résista à l'envie de resserrer sa main autour de sa gorge, même si aussi barbare que cela puisse être, il n'avait pas encore exclus cette option. Peut-être était-ce ce qu'il fallait à cette barbare, après tout ? Mais il avait un doute, est-ce que quelqu'un qui combat dans une arène de son plein gré n'apprécierait pas cela, justement ? Et ce n'était pas le but qu'il recherchait à l'instant. Il essaya de rejeter ces pensées inutiles pour se concentrer uniquement sur elle. Sa gestuelle, ce qu'elle pourrait bien avouer ou quoi que ce soit. Eivert voulait entendre ce qu'elle avait à dire avant de prendre sa décision, enragé mais lucide.